26.1.08

9:57 AM : Is this the end ?

my only friend, the end ?

Il faut se rendre à l'évidence : je n'écris plus. Vous aurez peut-être remarqué ? (Moi si : ce dernier post est le premier depuis des lustres où les suspects usuels ne laissent même pas une connerie pour dire "j'y étais, j'ai lu". Ca sent le sapin). Et le pire, c'est même pas que je n'ai plus rien à dire, parce que j'ai toujours cette forme de pensée bloguesque consistant à se regarder penser, à écrire dans sa tête, à poster interne. Retravailler les formules, gérer les effets. Juste, une fois le post plus ou moins prêt, ou du moins (parce que j'ai toujours écrit comme ça) une fois les grandes lignes posées et prêtes à être improvisées, je ne passe plus à l'acte.

On dirait un violeur qui parle. "Je ne passe plus à l'acte". T'as de ces phrases, des fois... Bref.

Pour la première fois depuis que j'ai commencé ce zinzin, il y'a maintenant... putain, 6 ans déja ?!, je me pose la question du pourquoi. Pourquoi j'écrirais anonymement pour une foule d'anonymes ? Mieux, pourquoi je l'ai fait pendant 6 ans ? Paradoxalement, la question ne se posait absolument pas au début, ce qui rendaient d'autant plus irritantes les questions des journalistes de l'époque (et d'aujourd'hui encore, si j'en crois ce boulet-là) du "mais pourquoi vous faites ça, les gens ?". Au début, j'avais juste envie d'appartenir, c'est aussi con que ça. Grands échecs amicaux courant au cul de grands échecs amoureux, et dans la fenêtre du PC, des gens qui avaient l'air sympas, et qui étaient manifestement aussi névrosés que moi, je voulais en être. Je voulais moi aussi faire des posts cryptiques à l'attention de mes amis (mais qu'un lecteur pouvait jouer à mettre bout à bout avec les posts cryptiques des copains, parce que ca sert à rien d'être *complètement* cryptique en public, évidemment). Linker et être linké. Ca vous démystifie d'un coup, non ? Ben voila : j'avais pas d'amis, j'en voulais des nouveaux. C'est d'ailleurs pas étonnant que l'un de mes premiers posts ait été une grande déclaration de mal-être et de solitude, c'était ma ligne éditoriale (dit comme ça, on dirait que tout était calculé, mais je vous assure que non. J'ai jamais rien calculé de ma vie, rien prévu. Trop d'effort). Crier au monde "j'vais pas bien, j'veux un calin !", sans espoir mais au cas où (oui, j'ai conscience de la contradiction). Je pense qu'on était plus ou moins beaucoup dans ce cas-là, à l'époque, d'ailleurs. Y'a qu'à voir à quelle vitesse les "bars à bloggers" se sont organisés... Et l'ambiance qui y régnait. On puait la misère émotionelle, sociale et sexuelle, le besoin d'attention, le besoin tout court. On puait aussi le profitage de la misère de l'autre, moitié victimes, moitié vampires, un dysfonctionnement ordinaire. Pas étonnant que ça ait vite tourné au kibezki. Notez bien que je dis "on", hein. Je jette pas de pierres, ou plutot si mais j'en garde autant pour moi, je vous les donne si vous voulez me les coller en travers de la gueule.

Ca c'était la base de base. Je pense que c'est toujours aussi vrai pour les blogs d'aujourd'hui - même si c'est écrit pour suivre la mode (qui n'en est déja plus une d'ailleurs) c'est toujours un besoin d'appartenir. On montre pas son cul en public en étant bien dedans, c'est aussi simple que ça. Ca vaut pour les bloggers comme pour les nymphos ou les stars de ciné. D'un autre côté, ca fait des lustres que je suis plus sorti de ma tanière, encore moins pour aller dans un bar à blogs, alors peut-être que le milieu à muté et qu'il est aujourd'hui plein de gens beaux et biens dans leur peau ? Ces connards sont partout. Ou pire, des gens qui écrivent dans le seul but de faire un lectorat et se faire éditer, publier, faire de la grosse caillasse et tirer les gonzesses. Les blogueurs qui vendent leur blog sont des grosses putes que je vomis.

Et puis je me suis laissé surprendre et prendre à contre-pied, après : je me voyais comme une mite minable attirée par la lumière, et j'étais une lumière sans le savoir (je sais, ca fait très j'me sens plus pisser, cette phrase, mais déja c'était un peu le cas à l'époque, et puis faites pas chier, je la trouve jolie quand même). J'avais des lecteurs, plein, beaucoup plus en tout cas que la trentaine de gens identifiés à l'attention de qui j'écrivais, et ils aimaient me lire, et ils me le disaient, et même y'avait des filles. Comprenez que, faute au passé, au collège/lycée et à la suite, j'ai très longtemps été profondément convaincu du fait que je n'étais rien, que je n'étais pas aimable (au sens premier du mot), pas intéressant, pas drôle et surtout que je ne le serais jamais, même pas la peine d'essayer bonhomme, t'es pas sur la liste, tu rentres pas. Alors ouais, du coup, prendre 800 lecteurs quotidiens dans la face, ca m'a fait un choc et ouais, du coup, je me sentais pas la moitié d'une star - j'avais beau me tourner moi-même en dérision et me rappeler à moi-même que c'était surement 800 lycéennes et lycéens illettrés, je peux pas nier que le bain de foule a eu un effet certain sur mon mal-être. Et que les filles en question ont fait tomber cette autre illusion adolescente que l'amour et la baise sont des chasses gardées pour rares privilégiés aux yeux bleus et/ou habitant rive gauche. Marrez vous, j'y croyais vraiment moi. Je m'étais résigné, dès mes 14 ans, à crever puceau. Je m'y étais fait, je ne cherchais pas, je n'en étais même plus triste, je m'étais fait une raison, c'était comme ça, y'en a qui ont, y'en a qui ont pas, moi au moins je parle anglais et j'ai une orthographe décente. C'est pas pour rien que j'ai encore une profonde parano quand une fille me parle hein. Je cherche la caméra ou les copines avec qui elle a parié. Mais au passage, donc, j'ai ré-évalué ma réalité : "ah d'accord, donc en fait, tout le monde baise et c'est encore plus facile à trouver que le poignon, et c'est l'amitié profonde qui est rare. OK, OK, good game Callahan".

Et puis, de cafardeux désespéré à ouebstar en paillettes, ça a encore évolué, après, quand cette fameuse blogosphère s'est montrée carrément délétère à mes nouveaux yeux. Quand j'ai commencée à la voir, justement, cette mer de misère, et les requins qui y nageaient entre deux eaux. Quand j'ai compris aussi qu'on ne pouvait pas faire confiance aux gens qui ont besoin d'attention. Méditez bien là-dessus, moi j'ai pris quelques couteaux dans l'dos d'un fort beau gabarit avant de tilter. J'ai jamais prétendu être un rapide du bulbe. Et bon, j'ai fait mon meltdown trick, pété un cable (d'un fort beau gabarit également), et envoyé chier tout ce joli monde, haï et conspué. Ce qui me faisait assez bander, puisqu'on est honnêtes autant le rester : il y'avait un réel plaisir à être haï des uns et qu'en dira t'on des autres, et de s'en foutre complètement. En un mot comme en cent, l'Eden n'en était pas un, et le cercle que j'avais rejoint (et même contribué à créer) pour me défaire à jamais des cercles était... ben, un cercle, quoi. Avec tout ce que ca implique de faux-semblants, de ragots, d'hypocrisie et de mesquinerie chafouine. M'en fous, maintenant j'avais Vaquette et un minimum de self-esteem, je les enculais tous.

Libéré donc du besoin, mais ayant encore trouvé un aspect nouveau à N/B : le dialogue, les commentaires. Je cherchais plus les commentaires "c'est trop beau c'que t'écris, je m'y reconnais vraiment, t'écris mes mots, on baise ?", mais plutôt "je suis d'accord, mais...". Age béni des Légions et des ChatFous, café de la gare prise de tête. Pas la même branlette, mais ca m'allait puisque je n'avais plus besoin d'affectif - j'avais besoin de distraction maintenant. Ou de confirmation que je n'étais peut-être pas qu'un con, va savoir ? C'est à partir de ce moment-là que mes motivations me sont plus floues. Je crois surtout que j'avais besoin de m'expliquer le monde en vous l'expliquant. Puisqu'au cours des années précédentes les grands piliers de ma vision cosmique étaient parties en miettes, il m'en fallait reconstruire un à neuf, au coeur de ma bulle à moi que j'ai. En gommer les contradictions, ou bien les assumer et les expliquer. Logiquement, sensément. Et, aussi, de faire confirmer mes jugements par mes pairs à couilles. Et vous m'avez vraiment aidés à ça, tous. Oui, même les plus casse-burnes d'entre vous. Même Jaded (hihuhihu).

Et bon, voila. J'ai plus d'insignifiance à remplir, plus d'ego à flatter, j'ai gardé quelques amitiés et ma vision du monde tient à nouveau la route et permet à sa théorie d'expliquer la majorité de mes résultats empiriques. Check. Du moins, c'est comme ça que je m'explique ma flemme totale d'écrire encore. Je n'ai pas tout dit, mais je n'en ai plus besoin - je me suffis. Ce qui fait probablement de moi un sociopathe, mais j'ai jamais aimé les sociétés alors ça va.

Je vous dois toujours un post sur la forêt amazonienne, je le ferai depuis le temps qu'il traine. Après... Aucune idée, vraiment. Non, non, rangez ça, ceci n'est pas un appel à l'aide "dites moi que vous m'aimez, dites moi que vous voulez que j'écrive !", ce n'est même pas un adieu en bonnet difforme parce que je sais que je reviendrai encore écrire une connerie tous les six mois quand même les bots Google ne viendront plus. Ne serait-ce que parce que putain, j'ai bossé sur N/B pendant 6 ans, et ca me ferait quand même mal au cul de le laisser crever. Pas de révérence, donc. Je me disais juste que vous aviez droit à une explication (et aussi, je suis un gros Narcisse à tendance passéiste, et j'aime bien me raconter ma propre histoire. Je vous 'cule, tas de veaux).

Enfin bref, asi es ma vida loca.

PS : C'est marrant comme en relisant ce passé mis sous forme d'Histoire, avec les liens de causalité et la trame narrative inhérente, je peux aussi attribuer à chaque phase sa propre bande originale. Il va sans dire que la vraie histoire est beaucoup plus organique et beaucoup moins bien tracée, délimitée, périodée que ça. Mais musicalement, si. Va comprendre, Charles.

This song is for the people
Who tell their families that they're sorry
For things they can't and won't feel sorry for
And once there was a desk
And now it's in a storage locker somewhere
And this song is for the stick pins and the cottons
I left in the top drawer
Let 'em all go
Let 'em all go...

The Mountain Goats - Cotton


9.1.08

12:27 AM : Worthless tripe

Parce qu'on écrit certains posts, et que d'autres s'écrivent à travers nous. Ceci est du deuxième genre.

Je ne sais pas si, comme moi, vous avez parfois des phrases qui vous arrivent dans la tête de but en blanc, qui s'imposent à vous de nulle part et qui vous font arrêter net ce que vous faisiez pour vous la répéter dans le confort de votre salon intracranien. Ne serait-ce que pour déterminer d'où elle sort.

Parfois c'est aussi con qu'une citation de film qu'on n'arrive pas à replacer, on voit les acteurs, la scène, le décor, mais pas ce qui vient avant ni ce qui arrive après. Ca me rend dingue ça, en général. God bless google dans ces cas-là. Passons. Celle-ci m'est arrivée au milieu des fuck shit goddamn cocksucker de Preacher, of all things : "Chacun d'entre nous a en lui un livre, un tableau ou une symphonie. Certains, trop rares, en ont plus d'un et sont reconnus à juste titre, d'autres n'en ont qu'un mais essayent de faire croire qu'ils sont de l'autre genre, et ça se voit(*)."

Ca s'arrête là, et je ne sais pas trop quoi en faire, ce qui en fait un post parfait - ca vient de nulle part, ca va nulle part, donc c'est bloggable, comme on dit (en parlant de cette phrase, marrant comme d'une ironie souriante j'en suis arrivé à une révulsion totale. Y'a plus qu'une poignée de gens qui peuvent me dire que "c'est bloggable" sans que j'aie envie de cogner. L'âge...). Ceci dit, d'une part je suis persuadé d'avoir déja lu cette phrase, ou au moins le début sans la clarification quelque part (possiblement Sandman, ca y ressemble), d'autre part je me demande à quel point elle est vraie. Déja, elle sonne comme une phrase d'auteur, ergo de quelqu'un qui a par définition au moins un livre en lui. Raisonnement circulaire. Je peux pas nier en avoir un (même si la citation de Pratchett quand on clique sa tête là au-dessus n'est pas là pour rien, j'aimerais l'avoir écrit, l'écrire me saoule rien que d'y penser). Pas forcément bon, d'ailleurs, mais au moins original, je crois. Je suis à peu de choses près convaincu qu'il en va de même pour tous ceux (j'emmerde les féministes, et je n'ajouterai pas un "et toutes celles" redondant, elles sont inclues dans le ceux, c'est grammatical. Connasses) que j'ai pu croiser - même si le livre en question était un traité d'économie néo-chrétienne, si la symphonie était du free punk et si le tableau était un monochrome de Klein (tiens, encore un qui est bon pour l'astérisque...), ils pourraient ajouter quelque chose au monde, laisser quelque chose qui n'eut pas été là si un spermatozoïde avait pris à droite après les poils. Bon.

Mais la vraie question c'est : y'a t'il des exceptions ? Des pauvres âmes sans livre, sans tableau, sans symphonie, sans même un tract politique ou une pétition ? Ca, oui, ca m'intrigue pour de vrai, comme tous les brainfucks sans réponses du style "qui viens-je ?", "d'où vais-je ?" et "quand est-ce qu'on baise ?".

Enfin bref, asi es ma vida loca.

PS : Je l'ai pas bloggué quand je l'ai appris parce que sur le moment ca m'a vraiment collé un coup, et depuis tous les fans doivent le savoir si ils ont leur Cassandre/PatrikRoy de poche, mais la vie est une pute avec un penchant pour l'ironie : Pratchett a Alzheimer. Il aurait pu avoir son crabe ou sa crise cardiaque comme tout le monde, mais non, c'est Alzheimer. Lui qui a illuminé tant de vies en jouant sur les mots va s'en retrouver privé, uns a uns. Crying shame is what it is. Et vous voudriez que je croie en un Dieu bon ? Sick fuck.

(*) : exemples ? David Eddings, Alexandre Jardin, Werber... Un seul livre, patiemment réécrit une douzaine de fois.